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Fiscalité : ce qui se cache derrière la RIE III… et comment la Suisse peut y remédier 

CG PCS VrLa campagne électorale en Valais est marquée par la pauvreté, voire l'absence de débat d'idées. Personne n'évoque par exemple la troisième réforme de l'imposition des entreprises (RIE III). Celle-ci résulte de la crise financière traversée par de nombreux pays. Pour éviter des pratiques trop inégalitaires et des pertes d'impôts, des pays de l'OCDE veulent maîtriser la concurrence entre Etats. La Suisse est à ce titre particulièrement visée, notamment parce que les entreprises étrangères sont moins taxées sur le bénéfice que les entreprises suisses. Centre Gauche-PCS Valais romand (CG-PCS) propose des pistes pour rendre la fiscalité suisse plus juste et soutenir ainsi la place économique suisse dans le contexte de la RIE III. 

Double concurrence fiscale - La situation actuelle en Suisse crée de grandes différences de traitement par rapport à l’impôt sur le bénéfice. Il y a tout d’abord une concurrence entre cantons : le taux d'imposition des bénéfices peut par exemple varier de 12.7% en Appenzell Rhodes-Intérieures à 24.2% à Genève. Centre Gauche-PCS veut atténuer cette concurrence fiscale qui pousse à une sous-enchère fiscale qui prétérite les finances publiques et, in fine, la qualité des prestations publiques. 

Pourtant, la réforme s'attaque avant tout à la taxation à deux vitesses pratiquée en Suisse, à savoir une imposition plus basse du bénéfice pour les entreprises étrangères ayant l'essentiel de leurs activités à l'extérieur du pays par rapport aux entreprises locales. Les pays voisins refusent que des entreprises s’installent en Suisse, y réalisent d’importants profits mais n'y paient que peu d’impôts. 

RIE III : un coût à compenser - Le coût estimé de RIE III est de 3 milliards de francs pour la Confédération et les cantons et de 1,5 milliard cumulés pour les villes et les communes. Le Conseil fédéral prévoit de compenser les cantons à hauteur de 1 à 1,2 milliard. La question est dès lors la suivante : où trouver les 2 milliards de francs qui manqueront aux cantons et le 1,5 milliard des communes suisses ? Cette question est tout à fait centrale, puisque le manque de revenus fiscaux a des implications directes sur les services publics des cantons et communes. Il s'agit de trouver des ressources supplémentaires, mais sans trop nuire à l'attractivité de la place économique suisse. 

Pour compenser les pertes fiscales et maintenir l’attractivité de la Suisse, le Conseil fédéral propose une dizaine de mesures (licence box, déduction des intérêts notionnels, step up, réduction des taux cantonaux sur les bénéfices, etc.). Au-delà de ces outils, il y a évidemment la taxation des gains en capitaux. CG-PCS y est favorable, mais à condition d'adapter la taxe à la durée de détention des titres : plus celle-ci est courte, plus le taux est élevé. Cette pratique encourage l’investissement à long terme et dissuade la spéculation. Cet impôt rapporterait environ 300 millions et nécessiterait, en complément, une augmentation de l'impôt sur le revenu accompagnée d'une vraie progressivité de cet impôt

Plus de solidarité, aussi de la part des entreprises étrangères - CG-PCS rappelle que sans taxe sur le gain en capital, sans vraie progressivité de l'impôt sur le revenu et avec une taxe faible ou inexistante sur les successions, nous devrons forcément consentir à réduire l’action de l’Etat et donc la qualité des prestations publiques. Le veut-on vraiment ? Évidemment, non. CG-PCS demande donc à ceux qui en ont les moyens de se solidariser et dans cette période difficile pour soulager la pression sur la classe moyenne. Les entreprises étrangères installées en Suisse profitent aussi de notre stabilité politique et sociale, de la qualité de notre main-d’oeuvre et de nos infrastructures. Nous sommes en droit de leur demander de contribuer davantage. 

Quel financement pour les nouveaux besoins du pays ? Certains régimes fiscaux cantonaux discriminatoires ne sont plus admis sur le plan international. La RIE III entraînera des pertes fiscales importantes tout en renforçant une concurrence fiscale malsaine et ruineuse. Il est donc nécessaire de trouver de nouvelles sources de financement pour des dépenses et des investissements à faire considérables au cours de ces prochaines années, mais nécessaires pour garantir la prospérité de la Suisse à long terme. Il s’agit des dépenses et des investissements liés à l’évolution démographique (santé, infrastructures de transport) mais aussi à la transition énergétique et à la recherche et l’innovation pour maintenir, dans la concurrence internationale des sites toujours plus poussée, la place économique suisse en pointe. La situation financière de la Suisse est bonne. La dette a été fortement réduite ces dernières années et le taux d’endettement par rapport au PIB est faible. De plus, en comparaison internationale, les taux d’imposition moyens effectifs des entreprises sont très modérés. Egalement pour les personnes physiques, la Suisse se trouve en général également dans le groupe de tête en comparaison internationale. 

CG-PCS préconise donc, en conformité avec les principes de l’équité fiscale et de la capacité contributive, les éléments suivants : 

  • Relèvement du taux plafond de l’impôt sur le bénéfice des personnes morales de 8,5% à 10%. Cette proposition permettrait à la Confédération d’engranger environ 600 millions de francs par an. Ce relèvement se justifie d’autant plus que le Conseil fédéral a abandonné la proposition d’introduire un impôt sur les gains en capital qui aurait rapporté plusieurs centaines de millions de francs par an. 
  • Déplafonnement du taux pour l’impôt fédéral direct des personnes physiques. Au-delà de 900'000 francs de revenu imposable, la progressivité du taux s’arrête à 11.5%. Au vu de certains salaires exorbi-tants des membres de la direction ou du conseil d’administration d’entreprises, cette proposition per-mettra de corriger un peu un écart salarial s’étant fortement accru au cours de ces dix dernières années entre les salariés des entreprises et leurs managers. 

Raymond Borgeat, Michaël Siggen, Robert Métrailler, Eliane Launaz Perrin
Sion, le 8 octobre 2015