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EmmanuelRevazNUn milliardaire égyptien qui se mouille bien entendu pour le bien du peuple, un Christoph Blocher soudainement très social, un Jean-Michel Cina et un Jean-Marie Fournier ma foi fidèles à eux-mêmes: voici en vrac quelques acteurs qui sont récemment intervenus sur la scène médiatisée d'Andermatt. Autant donner tout de suite notre impression: le spectacle a quelque chose de pathétique.

Le 23 septembre dernier, nous apprenons donc que le Conseil fédéral offre la possibilité à la commune uranaise de construire un gigantesque complexe touristique avec des fonds étrangers, promulguant ainsi une exception à la Lex Koller, qui n'avait soit dit en passant vraiment pas besoin de ce coup de massue dans la nuque.

L'histoire d'Andermatt et de la loi mise de côté, pour choquante qu'elle soit, a au moins le mérite de nous aider au diagnostic: celui qui met le doigt sur la schizophrénie (au sens littéral du terme: "esprit scindé en deux") dont souffre une bonne part de notre gent politique. La maladie se manifeste en premier lieu au niveau fédéral: d'un côté, on promulgue des lois (Lex Koller bien sûr, mais aussi Loi sur l'aménagement du territoire) et on se fixe des objectifs soit disant contraignants (voir la "Conception Paysage suisse") pour garantir une utilisation durable du paysage; de l'autre, on se vautre devant les promoteurs (à Andermatt) ou les multinationales (souvenez-vous de Galmiz) dès qu'il s'agit de projet de développement, fût-il en totale inadéquation avec le plan de zones concerné. Autre exemple de dédoublement des cerveaux: à Uri, il paraît qu'on perçoit la largesse fédérale comme un lot de consolation pour toutes les nuisances endurées en raison du trafic de transit. Alors, construisons, en plus de l'autoroute existante, des hôtels quatre ou cinq étoiles pour 3000 lits, 600 appartements, 100 villas et "chalets", un golf 18 trous et d'autres infrastructures sportives: enfin un peu de calme!

Lorsqu'on brandit l'argument de milliers d'emplois (peu importe leur durabilité) et de la croissance (peu importe sa nature), les esprits s'aveuglent et le sens critique s'évanouit, tout simplement. Le Valais n'est pas en reste: il avait fait les yeux doux à Amgen lorsqu'il avait senti vaciller le projet d'implantation du géant américain à Galmiz. Aujourd'hui, notre Conseiller d'Etat en charge de l'économie s'engouffre dans la brèche d'Andermatt, un peu comme un enfant envieux devant la sucette interdite que l'on vient d'offrir à un camarade. Spectacle pathétique, disions-nous, que cette course en avant vers la démesure. Contre laquelle plus rien ne semble pouvoir agir, même pas les lois.

Emmanuel Revaz, PCS Martigny