Il est des découvertes d’enfant qui débouchent inexorablement sur la perte d’un monde imaginaire.
Dans mon enfance, un étrange animal, mi-renard mi-belette, arpentait notre belle vallée du Rhône. Je ne l’avais encore jamais vu, ni l’aigle royal ou la marmotte d’ailleurs.
« Vallée où le Rhône a son cours, noble pays… »
Ainsi mourut mon ronasson un jour d’école où j’apprenais à lire. Mais je sus dessiner le cours du Rhône du glacier jusqu’au Léman. Un Rhône bien encadré, bien droit, avec son coude à Martigny. Des berges désertes, dangereuses, places de jeux interdites. Seule la cueillette des mûrons me permettait un accès accompagné. Le reste était désobéissance et défis d’ados.
Peu de touristes dans cette vallée, peut-être quelques hippies quémandant un ou deux jours de travail avant de poursuivre leur découverte du monde.
Tableau d’antan… tableau de maintenant.
Le Valais vante ses montagnes et sa neige poudreuse. Que de projets sur nos cimes, promotions, résidences secondaires, routes élargies, remontées mécaniques.
Pour ce Valaisan-là, le touriste a des skis aux pieds.
En cette phase de réchauffement climatique, de dégel du permafrost, je m’étonne de ne pas voir des projets plus ambitieux dans la vallée du Rhône.
Que fait-on de nos 120 km de potentielles pistes cyclables, sentiers de marches, places de pique-niques, aires de jeux, promenades à cheval, à rollers, skis de fond à roulettes, lieux de pêche, de repos et de rencontres ?
Penser la plaine en ressources touristiques.
Le projet Rhône 3 propose quelques pistes. Mais pour contenter l’écologiste, l’agriculteur, le politique, il manque d’ambition. Trop dans le présent.
Penser demain.
Profiter de ce projet sécuritaire pour pousser la réflexion sur un concept de tourisme durable. Un grand projet valaisan.
Imaginer des centres touristiques de plaine avec jeux aquatiques, patinoires à proximité, infrastructures sportives, location de vélos, mobilité facilitée, visites en villes, parcours gourmands, découvertes de nos ruines, nos vignes, nos bisses, nos produits agricoles.
Les villes seraient stations, des péniches résidences secondaires, des villageois maisons d’hôte. Les touristes voyageraient de Gletsch au Léman, de la vallée aux cimes, se déhanchant tant au son des cloches d’églises, de vaches ou de festivals Electroclette* estampillés Valais. Le Valais enflammerait la toile comme au Wankdorf un jour de finale. Tourisme d’été, tourisme d’hiver, tourisme durable.
Le Tourisme, la Culture, l’Agriculture, les Energies, l’Economie, les Sports, les Traditions, réunis par une même idée du futur.
Un Valais diversifié. Un Rhône allié.
Un rêve.
Et dans ce Valais rêvé, peut-être qu’un ronasson courra.
Marie-Paul Bender
*Electroclette : Concept alliant concert de musique électronique et dégustation de raclettes.
