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DenyseBetchovDepuis le congrès de Vienne en 1815, la Suisse a accepté la responsabilité de protéger l’expression de toute religion. Il s’agissait de reconnaître les mêmes droits pour ceux de confession catholique que pour les Protestants. Voilà plus de 200 ans que la Suisse mène une politique étrangère basée sur ces aspirations de neutralité et d’impartialité: ne pas prendre parti dans les conflits, rester pacifique, et mettre à disposition ses bons offices pour la résolution de différents.

Cette philosophie de paix et de neutralité s’est vue concrétisée par la fondation du Comité international de la Croix-rouge à Genève en 1863, par Henri Dunant, et ensuite par les conventions de Genève pour la protection des victimes en situation de guerre.  La cité de Calvin est ainsi devenue dépositaire et garante de ces conventions internationales, aujourd’hui ratifiées par plus de 190 pays.

Cette première étape de droit international en a permis d’autres - notamment le développement de cours d’arbitrage dont la première a siégé dans la salle de l’Alabama à Genève en 1872, précurseur de la Cour de La Haye et du mouvement pour la création du droit international.  La Suisse est devenue le siège de la Société des Nations (1919), et depuis, de nombreuses organisations et institutions internationales ont choisi de s’établir chez nous.

La Suisse est aujourd’hui reconnue comme un acteur important en faveur de la paix, la neutralité, et la médiation.  Nous en avons fait notre carte de visite, et nous en sommes fiers.  Il est vrai que nul pays n’est parfait, et notre histoire a aussi eu des moments de doute et de contradiction.

Mais notre identité dans le monde reste globalement identifiée à ces idéaux de neutralité et de droit humanitaire. Notre drapeau en a même inspiré l’emblème du CICR : la croix rouge.

Cependant, des changements profonds dans la perception du droit humanitaire et de ses origines nous ont menés à adapter ce symbole.  Il était devenu nécessaire de reconnaître que les principes du droit humanitaire puisent leur inspiration dans plusieurs cultures et religions. Il fallait laisser la place à d’autres symboles.  En 2006, après des années de négociation, une solution multi-variante a été adoptée : aujourd’hui,le mouvement de la Croix-Rouge porte trois symboles : la croix rouge, le croissant rouge, et le cristal rouge.  Ces trois emblèmes n’ont en rien modifié les principes du droit humanitaire.  Le CICR et le rôle de la Suisse en tant que gardienne de ces principes, en sortent renforcés.

L’esprit humanitaire de ces trois symboles est basé sur l’impartialité et le respect de chaque être humain.  La dignité de chacun, et sa liberté d’expression en découlent. L’exercice de la religion en est partie intégrante, aussi bien que le droit de disposer d’un lieu de culte et de ses symboles.

Comment imaginer que la Suisse renie cette philosophie sur son propre territoire?  Comment peut-on concilier une interdiction de minarets avec des principes de droit humain, de tolérance et de neutralité? Aucune démocratie au monde n’interdit ce symbole architectural qui ne sert qu’à désigner un lieu de culte.

Aux yeux du monde extérieur, une telle interdiction serait incompréhensible, et en parfaite contradiction avec la réputation que la Suisse s’est faite au sein de la communauté internationale.

Neutralité, intégrité, et protection des plus faibles ne concordent pas avec restriction et discrimination à l’encontre d’une religion.

La médiation et l’impartialité ne riment pas avec l’exclusion et l’interdiction de signes religieux.

Nous devons rester fidèles à nos valeurs, celles qui nous ont permis de privilégier en Suisse le développement du droit international et de ses institutions.  Le respect de ces droits fondamentaux ne dépend pas d’une réciprocité  –  il se justifie en soi.

C’est pourquoi nous demandons au peuple de rejeter cette initiative.

Denyse Betchov, PCS