La population suisse est appelée à se prononcer le 9 juin prochain sur des mesures urgentes de la révision de la loi fédérale sur l’asile. Fin 2012, le Parlement a accepté une batterie de mesures dites «d’urgence» (ce qui constitutionnellement devrait poser quelques questions, puisque les mesures sont appliquées avant le vote populaire).
Durant ces trente dernières années, le Parlement a procédé en moyenne à une révision chaque trois ans, toujours dans le sens d’un durcissement du droit. Cette fois-ci, le but est, une fois de plus, de lutter contre l’«attractivité» de la Suisse, cette qualité pour laquelle on lutte en matière économique mais qui se transforme en terrible défaut quand il s’agit d’asile. Il s’agit donc globalement, sur les propositions de la droite nationaliste en particulier, de limiter l’accès à l’asile.
Ce qui est le plus choquant dans cette révision, c’est la menace posée contre des catégories de personnes spécialement vulnérables, notamment par la suppression de la procédure d’ambassade et le refus du statut de réfugiés aux personnes qui n’acceptent pas de servir militairement.
Avec la révision proposée, les femmes, enfants et personnes âgées n’auront plus la possibilité de se rendre dans les ambassades pour demander l’asile, ce qui revient à les jeter dans les bras des passeurs, avec les conséquences qu’on imagine. Le droit à la protection accordé jusqu’ici aux personnes jugées menacées pourrait disparaître.
Quant aux personnes qui refusent de servir dans des conflits armés et cherchent à fuir, on voudrait les exclure par principe du droit à l’asile. Ces «déserteurs», souvent très jeunes, de qui on exige par la force qu’ils prennent les armes contre leurs compatriotes, ne sont-ils pas justement des fugitifs éminemment politiques et, partant, particulièrement menacés?
Je ne me permettrais évidemment pas de comparer le contexte suisse actuel avec sa situation durant la dernière grande guerre, mais je ne peux m’empêcher de penser aux excuses formulées par Ueli Maurer la semaine dernière aux Juifs de Suisse pour le rôle que le pays a joué (ou, plus justement, pas joué) lorsque des familles juives menacées avaient été rejetées aux frontières alors qu’elles cherchaient l’asile.
Le pays dépositaire de la Convention de Genève peut faire beaucoup mieux que des excuses à l’avenir, à commencer par dire NON à des mesures disproportionnées, inutiles et inhumaines!
Célestin Taramarcaz,
Député-suppléant (AdG/PCS)